Débat sur le budget européen
Le vote de la contribution française au budget européen est un acte formel, parce que la charge effective résulte des traités. La position que j’ai défendue est une protestation à l’encontre de la caricature d’Europe que nous donne le budget de l’Union Européenne. Le modèle n’a pas changé depuis trente ans et perpétue des négociations de boutiquiers. Tout laisse à penser que le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020, après l’échec du sommet des 22 et 23 novembre, va se résumer, pour l’essentiel, à la reconduction du système actuel. Par ailleurs, je dénonce l’absence de gouvernance qui affecte tout autant l’Union Européenne que la zone Euro.
A cet égard, j’ai eu l’occasion de formuler des propositions dans un rapport que j’ai rédigé à la demande du Premier ministre, en mars dernier, sur l’avenir de la zone Euro : institution d’un ministre et l’économie et des finances, mutation de l’eurogroupe en gouvernement économique et budgétaire, création d’un d’un Traité européen et constitution d’un comité de supervision de la gouvernance de la zone Euro, composé de parlementaires désignés par les chambres des Etats membres de la zone Euro.
La zone Euro doit devenir le premier cercle de fédéralisation. Ayant fait le choix de la monnaie unique, nous devons assumer ce partage de souveraineté. Au fond, mon vote est un « coup de gueule » pour l’intégration politique en Europe. C’est un appel au sursaut.
Le Traité de Lisbonne a institué une procédure de conciliation qui tend à rééquilibrer les pouvoirs entre le Parlement et le Conseil. En vigueur depuis trois ans, il est significatif que le comité de conciliation est systématiquement convoqué dans le cadre de la procédure budgétaire. A la vérité, le budget de l’Union souffre de ne pas disposer de ressources propres, dépendant ainsi de la contribution des Etats membres.
Force est de constater que ce budget est à la recherche d’un sens, puisque 85 % des crédits repartent vers les Etats membres. Ce mécanisme s’oppose à l’intégration en perpétuant la préservation jalouse des intérêts financiers nationaux.
Dans un système idéal, le budget européen disposerait de ses propres ressources, votées par le Parlement européen, composé de deux chambres. Ce schéma idéal n’est malheureusement pas imaginable à court terme.
Ce que je constate, c’est qu’à l’intérieur de la zone Euro, lorsque survient un risque systémique (crise des dettes souveraines en Grèce, en Espagne, fragilité du contrôle prudentiel des banques en Irlande ou a Chypre), ce ne sont pas les membres de l’Union mais ceux de la zone Euro qui inscrivent les crédits dans leur budget national, qu’il s’agisse de prêts bilatéraux ou de constitution du capital du Mécanisme européen de stabilité (MES). Dans ces conditions, je souhaite une association étroite des parlements nationaux. Il y a urgence à donner des gages de légitimité démocratique.
Je me suis rendu au congrès européen de l’ALDE, en octobre. J’y ai rencontré des libéraux plus modérés que ce que j’avais à l’esprit. Au surplus, leurs convictions fédéralistes y ont été exprimées avec une apparente sincérité. A ce stade, l’UDI a le devoir de rencontrer les responsables politiques des différents Etats membres de l’UE en vue de confronter ses visions et ses propositions avec celles de nos partenaires. En l’état, je reconnais les signes de convergence qui nous rapprochent de l’ALDE. Il nous reste à vérifier que nous sommes prêts à porter un projet commun pour sortir l’Europe de la crise.
Prix Nobel de la Paix, l’Europe ne peut se résigner à devenir le maillon faible de l’économie mondiale, à subir les effets de la guerre économique mondiale.
Jean Arthuis 30/11/2012